Encadrer un chantier, c’est bien plus qu’un métier : c’est construire l’avenir

Sur un chantier, il y a les plans, les matériaux, les machines… et puis il y a celles et ceux qui donnent vie à tout cela. Les chefs d’équipe, chefs de chantier, conducteurs de travaux et chefs d’atelier sont les véritables chefs d’orchestre du BTP.
Ce sont eux qui traduisent la vision des architectes en réalisations concrètes, qui coordonnent les savoir-faire, arbitrent les imprévus, et veillent, chaque jour, à la sécurité et à la qualité du travail accompli. Mais ces métiers de l’encadrement, piliers du secteur, sont en pleine mutation. À l’heure où le bâtiment se transforme — transition écologique, révolution numérique, nouvelles exigences réglementaires et sociétales —, leurs missions se réinventent. C’est tout le sens de l’étude menée par l’Observatoire Prospectif des Métiers et des Qualifications du BTP (OPMQ), avec la FFB, qui actualise la photographie du terrain pour comprendre les évolutions à l’œuvre et anticiper les besoins en compétences.

Des métiers à la croisée des techniques, du management et de la transition

Sur le terrain, les encadrants de chantier sont à la fois techniciens aguerris, managers d’équipes, gestionnaires de projets et garants de la sécurité. Ils doivent composer avec des chantiers toujours plus complexes, où les contraintes environnementales, la maîtrise énergétique et la digitalisation s’imposent comme de nouveaux standards.

Le conducteur de travaux devient un véritable stratège : il pilote plusieurs chantiers à la fois, gère les délais, les budgets, les relations clients et la coordination entre corps d’état.
Le chef de chantier, lui, incarne la maîtrise opérationnelle. Il planifie, organise, fédère et veille à ce que chaque étape du chantier se déroule dans les règles de l’art.
Quant au chef d’équipe, il reste le pilier de la production : un meneur d’hommes, proche du terrain, garant de la qualité du travail et du respect des délais.
Enfin, le chef d’atelier, souvent dans l’ombre, assure la préparation, la logistique et la maintenance des équipements — un maillon essentiel à la fluidité du chantier.

Leurs défis sont nombreux : intégrer le BIM, anticiper les impacts environnementaux, s’adapter à de nouveaux matériaux, attirer et former les jeunes générations. Le chantier devient un lieu d’innovation autant que d’apprentissage. « Sur ces dernières années, les activités relevant des fonctions d’encadrement de chantier et d’atelier ont évolué. Ce qui a principalement impacté les activités de ces fonctions se sont, selon les entreprises, l’augmentation de la charge administrative (56 % des répondants). Ces évolutions se traduisent pour les fonctions d’encadrement à la fois au moment de répondre à un appel d’offres (notamment pour les conducteurs de travaux) avec une augmentation des exigences administratives, mais aussi pendant l’exécution du chantier avec une augmentation des obligations de suivi et de reportings.

La rigueur que demande la charge administrative est d’autant plus importante dans un contexte de judiciarisation des chantiers. On observe également que l’augmentation et la complexification des charges administratives impactent fortement les entreprises de taille moyenne (10 à 50 salariés) alors que l’évolution du management des nouvelles générations est un facteur qui impacte davantage les entreprises de 50 salariés ou plus. »

De nouveaux défis à relever

Les résultats de l’étude sont clairs : ces métiers doivent désormais intégrer de nouvelles compétences.
Les encadrants sont en première ligne face à la transition écologique, qui bouleverse les méthodes de construction : utilisation de matériaux biosourcés, gestion fine des déchets, respect des bilans carbone, amélioration de la performance énergétique. Ils deviennent aussi ambassadeurs du changement, chargés de sensibiliser leurs équipes aux éco-gestes et aux nouvelles pratiques.

La numérisation des chantiers transforme également les façons de travailler. Lecture de maquettes numériques, suivi en temps réel via des outils collaboratifs, planification assistée par logiciel : les encadrants doivent désormais manier aussi bien la truelle que la tablette.
Enfin, la montée en puissance du Lean Construction et de la préfabrication impose une planification plus fine, une coordination millimétrée et une anticipation renforcée des flux et approvisionnements.

Des parcours multiples, un même engagement Autre enseignement fort de l’étude : la promotion interne demeure la principale voie d’accès à ces fonctions. Beaucoup de chefs de chantier et de chefs d’équipe sont d’anciens compagnons devenus encadrants grâce à leur expérience et à la reconnaissance de leurs pairs.
Cette progression témoigne d’une valeur fondamentale du BTP : la transmission. Le chantier reste une formidable école où l’on apprend par la pratique, par l’observation et par l’exemple.

Mais pour répondre aux fortes tensions de recrutement — +50 % de projets de recrutement sur ces métiers en cinq ans —, les entreprises misent désormais davantage sur l’alternance et la formation continue. L’objectif : attirer de nouveaux talents, accompagner la montée en compétences et préparer la relève.

Encadrer, c’est diriger… mais aussi inspirer

Au-delà de la technique, ces métiers reposent sur des qualités humaines fortes : écoute, pédagogie, réactivité, sens du collectif.
Les encadrants de chantier sont à la fois des managers, des médiateurs, des formateurs et des ambassadeurs de la sécurité. Ils incarnent la culture du chantier, celle où l’on apprend chaque jour, où l’on s’adapte, où l’on trouve des solutions, ensemble.

1 300 à 1 400 créations nettes d’emploi par an à horizon 2030. L’emploi dans la fonction d’encadrement connait une hausse continue depuis 2017. La hausse annuelle moyenne sur la période 2017 – 2023 est de +3% et représente près de 2 600 créations nettes d’emploi tous les ans. La plus forte hausse concerne les conducteurs de travaux avec une augmentation de 3,8% par an des effectifs salariés tandis que les effectifs des chefs de chantier ont augmenté de 1,6% par an sur la même période. Les entreprises font déjà face à de nombreuses difficultés de recrutement. Quelle que soit la fonction d’encadrement, au moins 70 % des entreprises ressentent déjà des difficultés de recrutement et parmi les recrutements difficiles, plus d’un tiers des entreprises renoncent à pourvoir des postes faute de profils adaptés.

Dans un secteur en pleine transition, ils sont les pivots du changement : ceux qui traduisent les ambitions de durabilité et d’innovation en actions concrètes sur le terrain.

Encadrer un chantier, c’est finalement bien plus que superviser des travaux : c’est bâtir la confiance, transmettre un savoir-faire et construire un avenir durable.

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